
Paul Lachapelle et Jocelyne Gingras, 71 ans
Rouyn-Noranda (Rollet)Paul Lachapelle est détenteur d’un secret bien particulier. En fait, il aimerait bien que ce ne soit plus un secret d’État. Voici : côté météo, les étés de misère qu’on connait depuis 1958 sont dus au gouvernement et à des intérêts privés qui se sont mis ensemble pour créer des nuages artificiels. Avouez que ce n’est pas mince comme révélation. Certains diront qu’il charrie et qu’il voit des conspirations où il n’y en a pas. Laissez-moi vous expliquer l’origine de cela.
En 1958, un bon nombre de municipalités ont vu un de leurs citoyens se faire proposer l’installation, dans leur cour, d’une machine à pluie (un projet pilote disait-on), en échange d’une petite rémunération afin de lancer dans les airs à intervalle régulier de la poudre d’argent ou de bronze. Cela faisant en sorte de regrouper l’humidité présente dans l’air, en créant donc des nuages artificiels. De cette façon, on pouvait écourter une sécheresse en faisant apparaître une pluie salutaire et contenter Hydro-Québec qui ne manquerait jamais d’eau derrière ses barrages. À Rollet, c’est monsieur Maurice Daoust qui a reçu la machine qu’il devait faire fonctionner sous le regard curieux de Paul. Comme la famille Lachapelle et quelques autres ont jugé par la suite que les étés n’ont jamais été aussi beaux qu’avant, Monsieur Lauréat Maltais, exaspéré, serait allé tirer de la carabine sur la machine à pluie de Maurice, causant ainsi la fin de la mise en service de l’appareil. La plupart des machines à pluie ont été rapatriées dans les années suivantes et quelques anciens se rappellent du projet gouvernemental. Environnement Canada tourne en dérision l’idée d’une suite au projet pilote, mais Paul Lachapelle et quelques autres restent convaincus que les techniques se sont raffinées et qu’on crée encore de toutes pièces des temps pluvieux par la main de l’homme. Le temps et la perspicacité de quelques fouilleurs aguerris nous diront ce qu’il en est. Sauront-ils faire mentir Paul ou lui donneront-ils raison? Ce qui est sûr, c’est que Paul a ses arguments et ses observations en poche pour en discuter comme un bon détenteur d’une information précieuse et rare.
Pendant ce temps, sa femme Jocelyne veille sur la généalogie de sa propre famille (les Gingras) sur l’histoire du village de Rollet et sur l’époque mythique des années 20-30-40. C’est qu’elle habite pratiquement chez sa mère de 101 ans pour en prendre soin et bien sûr, pour réécouter plusieurs fois par mois le récit légendaire de ces années qui recèlent tous les ingrédients pour étonner et surprendre les plus jeunes. Elle veille sur l’arbre généalogique familial qui remonte à 10 générations sans aucun trou. Elle s’exerce aux détails à répéter avec une énergie et une quantité de mots à la minute qui n’a pas de fin.
Bref, si Paul est assis sur un secret, Jocelyne est assise sur un trésor.





