Diane Veillette, 70 ans

Rouyn-Noranda (anciennement St-Janvier de Chazel et La Sarre)

Dans sa vie, Diane a eu à travailler à La Sarre, dans une entreprise privée spécialisée dans les prêts personnels. Dans les années 60-70, les banques ne prêtaient pratiquement pas d’argent pour des petits montants et il fallait alors se tourner vers ces entreprises qui avaient pignon sur rue, comme celle où travaillait Diane. Le hic se situait au niveau des taux d’intérêt. Ils étaient faramineux! Que dis-je, titanesques!  Dans le jargon du métier, on dit que c’étaient des taux usuraires qui aujourd’hui seraient considérés comme illégaux (environ 20% à 25% par année). Diane avait la tâche délicate d’être parfois à la réception et souvent aux rappels pour collecter les montants des retardataires. Elle avait une éducation qui la prédisposait au sourire, mais disons qu’elle devait parfois en ajouter une couche pour éviter que les frustrations des clients ne prennent une tournure démesurée. Il est difficile de « péter une coche » à quelqu’un de doux et souriant. Imaginez appeler une dame qui s’est pris un prêt personnel de 2000$ uniquement pour payer les cadeaux de Noël, et qui est en retard de paiement rendu en juillet, surtout qu’elle vient pour emprunter pour la même raison presque chaque année. Un autre client qui finance ses vacances avec ce genre de prêt et qui ne voit pas le jour de finir de le payer. C’est sans compter ceux qui payaient leur mariage avec ce prêt et qui se cherchaient désespérément des raisons (bonnes ou mauvaises), pour avoir une extension du terme de remboursement, jusqu’à se demander s’il n’aurait pas dû éviter carrément de se marier. Bref, personne n’entre dans ce genre de commerce par gaieté de cœur et les actions à entreprendre sont parfois cruelles. Toujours est-il que Diane a considéré que c’était la meilleure école pour apprendre à travailler dans un métier au public. Après ce genre d’expérience, tout devenait soudainement possible et léger. Amenez-en du secrétariat pour la Commission scolaire à La Sarre, du surtemps dans un magasin de tissu, puis du secrétariat pour des professionnels ou pour la CSST à Rouyn-Noranda, parce que Diane avait travaillé son seuil d’endurance aux situations problématiques dès le début de sa carrière. Parfois, il vaut mieux aller droit vers des tâches nécessaires mais difficiles qui nous poussent au dépassement lorsqu’on débute l’âge adulte. Le contraire est plus pénible à vivre, car on s’habitue toujours au confort.

Seriez-vous surpris si je vous disais ensuite qu’une des choses qu’elle a le plus aimées dans son travail pour la CSST, c’était la semaine annuelle du positivisme? Oui, une semaine entière où l’ensemble des employés ont l’obligation morale de ne parler que positivement, au risque de devoir mettre de l’argent dans un pot commun, si un chialage sort de leur bouche. À ce qu’on raconte, la cotisation de Diane au pot commun était toujours nulle. Elle s’est même trouvé le moyen de parler de son divorce d’une manière positive, en spécifiant que c’était son meilleur coup à vie puisque, depuis ce temps, elle jouit de plus de liberté. Elle jouit de plus de temps pour elle. Bref, elle jouit plus et de toutes sortes de façons, depuis qu’elle est seule! À la table à café, ça riait très fort.